Les types d’engrais et la conception des agriculteurs relative à l’emploi des fertilisants, n’ont cessé d’évoluer tout au long du 20ème siècle jusqu’à aujourd’hui. L’agriculture de l’après-guerre n’a plus rien à voir avec l’agriculture de nos jours qui fait face à des urgences environnementales et sanitaires. Et pour cause : les enjeux agricoles et les rendements des cultures ne sont plus les mêmes. Les pratiques de fertilisation n’ont cessé de s’adapter en conséquence au sein des productions. Découvrez l’évolution de la fertilisation du 20ème siècle à aujourd’hui.
La fertilisation avant 1914
Concurrence de produits agricoles et évolutions
Les années d’avant-guerre représentent une petite révolution agricole en France, mais aussi en Europe. Des évolutions techniques apparaissent : machines agricoles, sélection des plantes, transformation des produits issus de l’agriculture, et engrais chimiques. Ces changements majeurs sont motivés par une concurrence accrue des produits agricoles, en provenance d’Amérique, d’Asie ou encore d’Océanie. Des prix bas font leur apparition sur le marché français, qui connaît en plus, un accroissement de la population et des crises graves en matière de production. La viticulture subit par exemple, des maladies comme le phylloxéra.
Production d’engrais chimiques
C’est dans ce contexte agricole concurrentiel, que des solutions d’engrais chimiques voient le jour. L’objectif de ces nouveaux produits : accélérer les rendements en urgence. Des laboratoires de recherche et développement démontrent alors l’efficacité des produits chimiques sur le développement des plantes. La législation et les exploitations agricoles adoptent ces solutions. Les stations agronomiques et les laboratoires en microbiologie prennent de l’ampleur. Tous ces acteurs s’intéressent à la résolution de problèmes décisifs. Ils basent pour cela leurs travaux sur des études démontrant l’impact des engrais chimiques, composés notamment de phosphore, d’azote et de potasse, relatif à l’évolution quantitative des rendements.
Controverse sur le rôle des engrais chimiques
“Viande ou alcool ?” : c’est la question soulevée suite à une controverse sur le rôle des engrais chimiques, née en 1903 aux Etats-Unis entre deux professeurs de Californie. Le professeur Whitney soutient alors que le rôle de ce type d’engrais n’est aucunement alimentaire, mais que ces derniers font office d’excitants. Des investigations se mettent en place, et l’intérêt pour les oligo-éléments ainsi que pour les éléments considérés comme mineurs comme le magnésium, le soufre, le calcium et la silice sont mis en lumière. Il est ainsi démontré que ces éléments, introduits en faible quantité dans les cultures, permettent une augmentation des rendements sans aucun rapport avec les quantités d’éléments chimiques épandus. Des résultats exceptionnels, via notamment l’introduction du bore et du molybdène, sont démontrés. Pour autant, les carences des plantes et des sols en oligo-éléments et en éléments mineurs sont encore difficiles à déceler.
L’emploi des engrais après-guerre et jusqu’aux années 2000
L’implication du gouvernement français
De retour de la Première Guerre mondiale, les exploitants agricoles découvrent de nouvelles possibilités pour accroître leurs productions. Le gouvernement français contrôle désormais la production et la commercialisation des engrais chimiques. Sous son contrôle : la production nord-africaine de phosphate, les gisements de potasse d’Alsace, ou encore la production d’azote à l’office National Industriel de l’Azote situé à Toulouse. Des publicités sur les engrais apparaissent ainsi que divers services d’accompagnement pour les agriculteurs. Pour autant, les techniques agricoles ne sont pas optimales, et les rendements plafonnent. Le seuil de production en blé d’hiver varie en moyenne entre 20 à 30 quintaux à l’hectare sur tout le territoire, et peut aller jusqu’à 50 quintaux à l’hectare en situation exceptionnelle.
De la croissance à la stagnation des rendements
Croissance des rendements et menace
L’agriculture connaît une transformation profonde après la Seconde Guerre mondiale. La croissance des rendements durant les 30 glorieuses est sans précédent au 20ème siècle. Par ailleurs, des progrès scientifiques sont réalisés en continu ce qui modifie les fondements théoriques de la fertilisation. À l’emploi traditionnel d’azote, de phosphate et de potasse dans les formules d’engrais, s’ajoute un nouvel enjeu relatif à la fertilisation : la non-optimisation de la quantité et de la qualité des rendements due aux carences des plantes en oligo-éléments et aux problèmes liés au pH des sols.
Appauvrissement des sols
L’importance de nourrir les plantes et les sols en fonction de leurs besoins nutritifs n’est plus à prouver pour les comités de recherche. Pour autant, les habitudes de consommer des formules d’engrais génériques, qui ne s’adaptent pas aux besoins spécifiques de chaque culture persistent. La croissance des rendements diminue de plus en plus chaque année puis stagne, particulièrement à partir des années 1990. Et pour cause : les réserves nutritives naturelles des sols sont épuisées, ce qui ne permet plus aux stimulants chimiques de faire leur effet comme par le passé. Les sols pauvres en éléments nutritifs, ne permettent plus de nourrir convenablement les plantes, répondant faiblement aux stimuli.
De la fertilisation à la fertilité des sols
Les années 1980 marquent un tournant dans la prise de conscience relative aux bénéfices d’une fertilisation raisonnée sur la qualité du sol. Cette prise de conscience est aujourd’hui renforcée par les enjeux écologiques actuels, ainsi que par une demande accrue des consommateurs pour des produits nutritifs et sains. La fertilisation doit aujourd’hui être au service des besoins nutritifs du sol et des plantes, afin de stimuler la fertilité du sol et des végétaux. La biodisponibilité des éléments nutritifs prime pour obtenir des rendements qualitatifs et quantitatifs.
Référence : Afes – Tiré de la publication “Quatre siècles de fertilisations”